Qui : Slash | Quand : 2000 | Quoi : Ain't Life Grand, Live Era 87-93, Blues Ball...


Quelle est la composition de la nouvelle version de Snakepit ?
Le chanteur est Rod Jackson, le bassiste Johnny Griparic est avec moi depuis Blues Ball, le groupe de blues avec lequel j'ai tourné pendant quelques temps. Le batteur Malt Laug vient d'un groupe appelé Venice et le guitariste rythmique Ryan Roxie joue encore parfois avec Glamnation.


Le titre très optimiste du nouvel album, Ain't Life Grand (La vie n'est-elle pas superbe), doit-il être compris comme une déclaration d'intention de ta part ?
Ce n'est pas une déclaration, c'est la première chanson que Rod Jackson et moi avons écrite ensemble. Alors quand est venu le moment de trouver un titre pour l'album... cela m'a semblé bien lui coller. Je prend ce groupe au sérieux mais je ne vais pas pour autant produire une "déclaration d'intention" et faire imprimer les textes sur la pochette du CD en prétendant que cela explique totalement qui nous sommes et ce que nous faisons. Ain't Life Grand est juste un titre humoristique qui peut s'appliquer à beaucoup de situations. J'ai travaillé avec mon frère, Ash Hudson, sur la pochette de l'album. Ash a une boîte d'art graphique et nous avions déjà travaillé ensemble sur la pochette de It's Five O'Clock Somewhere, le premier album de Snakepit.


Qui a produit l'album ?
Nous avons commencé la pré-production seuls et Jack Douglas est ensuite arrivé. Nous avions les chansons et les arrangements mais il nous manquait quelque chose pour lier l'album. Jack avait exactement ce qu'il fallait, il comprend bien la dynamique d'un groupe de rock et nous a aidé à ce niveau, en résolvant des questions qui nous semblaient soudain dramatiques : "douze mesures de coda ou seulement six à la fin de ce morceau ?". Tu as parfois du mal à sortir de l'anecdote pour te concentrer sur l'essentiel. A un moment j'hésitais à enregistrer un riff à très, très haut volume en pensant que c'était peut-être un peu frimeur de ma part et il m'a dit "Go, ça sonne bien ainsi". C'est aussi Jack qui nous a présenté Raya Beam, une rappeuse qui chante sur l'intro de "Mean Bone". Il nous a donné l'inspiration dont nous avions besoin et a ôté nos inhibitions. C'était super de travailler avec un producteur que nous respectons, Jack Douglas a produit une bonne partie des grands groupes des seventies et aussi John Lennon.


On a parfois des difficultés à distinguer les parties de guitare de Ryan Roxie des tiennes, c'est voulu ?
Moi je les différencie aisément. Si tu as des problèmes, je vais te simplifier la vie. Le style de production de Jack Douglas est de garder les guitares en stéréo, à gauche et à droire, c'est un premier repère. Le son permet aussi de nous distinguer l'un de l'autre. Sur le titre "Rusted Heroes" je joue un solo en slide et le solo de Ryan vient ensuite. D'une manière générale, mes interventions sont faites au feeling, alors que Ryan joue des suites rythmiques d'accords bien établies sur le côté gauche de la stéréo et qu'il n'a pas joué beaucoup de solos.


Quel accordage utilises-tu justement pour le slide de "Rusted Heroes" ?
Je le joue en open de Sol. Quand je dois jouer du slide en open, je sors ma Travis Bean. Avant que Kramer ne devienne une compagnie indépendante Travis Bean et Kramer travaillaient ensemble, mais ils ne sont pas restés associés très longtemps. C'est Joe Perry d'Aerosntith qui m'a fait découvrir les Travis Bean. Le manche est en aluminium fantastique pour le slide. J'ai utilisé cette guitare pour toutes les parties de slide de l'album, sauf sur "Shine", que j'ai joué sur une Les Paul réglée avec une action assez haute, réservée pour les parties de slide jouées en accordage standard.


Le feedback sur I'intro de "Life's Sweet Drug" est assez infernal, comment l'as-tu réalisé ?
La chanson a été enregistrée live en studio, mais je n'arrivais pas à trouver le feedback qu'il fallait, et je l'ai laissé de côté pour plus tard, puis je l'ai oublié. Quand le disque a été terminé nous sommes allés mixé à New York et je me suis aperçu que l'intro manquait. Heureusement j'avais amené ma guitare. Je voulais le feedback total du Marshall, sans utiliser un casque d'écoute. Alors, j'ai demandé à Jack Douglas de me compter le rythme de l'intro, j'ai frappé la note et attendu qu'il me dise à quel moment arrêter.


Les musiciens de Snakepit ont changé plusieurs fois. Quelle était ton idée lorsque tu as formé le groupe ?
Tu sais que même avec Gn'R, j'ai toujours aimé jammer sur scène avec d'autres musiciens et enregistrer en studio pour des projets extérieurs. Parce que j'aime jouer. Lorsque j'ai formé la première version de Snakepit, c'était seulement temporaire et notre seul but était de jouer quelques concerts. Cela s'est passé pendant le hiatus entre la fin de la tournée "Illusion" de Guns n'Roses et le début supposé de l'enregistrement de l'album suivant. L'attitude d'Axl Rose l'a laissé à l'état de projet, puisque nous nous sommes séparés entre-temps. C'est pour cette raison que le premier album de Snakepit, It's Five O'Clock Somewhere, était composé d'idées initialement destinées à ce qui devait être le nouvel album des Guns. Mais Axl et moi étions en désaccord total quant à la musique qui devait se trouver sur le nouvel album. Je lui ai fait écouter les maquettes de mes chansons et il m'a dit qu'il ne voulait plus de ce style de musique, il ne désirait plus chanter du rock. Je savais que mes morceaux pouvaient donner un superbe album des Guns, mais Axl voulait un son dans le style industriel et des chansons semblables à celles de Pearl Jam.


Qu'as-tu fait alors ?
J'ai commencé à jouer les titres de mes maquettes avec des amis. Je connaissais le bassiste Mike Inez d'Alice In Chains, le guitariste Gilby Clarke et le batteur Matt Sorum venaient des Guns, où je les avais fait entrer, et ils étaient désormais dans la même situation que moi. Nous étions totalement incertains du futur du groupe. La situation avec Axl s'est tellement dégradée que nous avons décidé d'enregistrer un album, sans plus nous préoccuper des Guns. Et c'est ainsi que nous avons fait le premier album de Snakepit, juste pour aller au bout de notre projet. Nous n'avions toujours pas de chanteur et j'ai organisé des auditions pendant lesquelles j'ai choisi Eric Dover parmi un grand nombre de vocalistes. Nous avons écrit les textes des chansons juste avant l'enregistrement des vocaux d'Eric, c'était vraiment dans l'urgence du moment, dans un sens cela nous plaisait, même s'il y avait un côté fait à la va-vite.


Qu'est-il arrivé aux membres de la première version de Snakepit ?
L'album était terminé, les relations entre Axl et moi ne s'arrangeaient pas du tout et j'ai décidé de partir eu tournée avec Snakepit. Matt Sorum était lié par contrat aux Guns et il a été obligé de nous quitter, sur l'insistance d'Axl. Mike Inez devait retrouver Alice In Chains et j'ai dû engager rapidement une nouvelle section rythmique, avec le batteur Brian Tichy et le bassiste James Lomenzo. Nous sommes partis en tournée, 80 shows sur quatre continents pour une durée de quatre mois. Je voulais continuer la tournée mais la maison de disques des Guns m'a dit de revenir parce qu'Axl voulait enregistrer. Nous nous sommes rencontrés plusieurs fois sans trouver de terrain d'entente et j'ai fini par quitter les Guns en octobre 96. Ensuite, mon manager m'a appelé pour me dire que nous avions une offre d'une semaine, pour jouer dans un festival en Hongrie. Mais à ce moment je n'avais plus de groupe ! Il me fallait des musiciens permanents et j'ai d'abord engagé Teddy Andreadis qui avait joué des claviers et de l'harmonica avec les Guns. Il m'a présenté quelques uns de ses amis et c'est comme cela qui j'ai rencontré le bassiste Johnny Griparic. Nous avons alors formé un groupe que nous avons d'abord appelé Slash's Blue Balls pour le festival en Hongrie, puis plus simplement Blues Ball par la suite, en changeant la position de la lettre "s". Nous avons continué à tourner .près le festival et Blues Ball devenait une entité permanente, bien que le batteur et le guitariste rythmique changeaient à presque chaque concert. Finalement, j'ai fait le point et je me suis dit que Blues Ball était juste un passe-temps. J'ai décidé de me consacrer sérieusement à Snakepit.


Comment as-tu trouvé de nouveaux musiciens ?
J'avais déjà un bassiste, Johnny. J'ai rencontré le guitariste Ryan Roxie via Alice Cooper qui me l'a présenté. La première fois que j'ai joué avec lui, j'ai immédiatement pensé que j'avais enfin trouvé le rythmique qu'il me fallait. Ryan est comme une version améliorée de Gilby Clarke et il a aussi un peu d'Izzy Stradlin en lui, ce style de guitare rythmique que je n'ai jamais été capable de jouer moi-même mais qui complète parfaitement mon jeu en solo. Le batteur était un autre problème, on changeait très souvent mais lorsque nous avons vu Matt Laug jouer avec Venice au Baked Potato, un club de rock de Hollywood, il nous a impressionné. J'ai jammé avec lui après le concert et il a accepté de se joindre a nous. Il nous manquait pourtant toujours un chanteur et Johnny Griparic m'a présenté Rod Jackson, qui s'est révélé être un grand vocaliste. Snakepit était enfin au complet, avec quatre musiciens et un chanteur. Nous avons commencé à composer ensemble et en juillet 99, nous sommes entrés en studio pour enregistrer.


Tu es bien sûr toujours fidèle à tes Les Paul ?
Je suis un fan loyal de Gibson, mais je suis très exigeant quant aux guitares que j'utilise. Sur scène, je joue systématiquement tout au long du show sur le même instrument, je n'ai pas besoin d'avoir six guitares comme Rick Nielsen de Cheap Trick. Il me faut une Les Paul principale et une autre en réserve. En studio, c'est pareil. Gibson m'a construit plusieurs Les Paul modèle Slash que j'ai renvoyé parce qu'elles ne me convenaient pas. Il a fallu plusieurs modèles signature avant que je ne trouve celle sur laquelle je me sens vraiment à l'aise.


Sur quelles guitares joue Ryan Roxie ?
Sa principale est une GMP, il est endorseur de la marque et a son propre modèle Roxie, qu'il a aidé à dessiner. C'est une solidbody entre Gretsch et Les Paul avec des micros humbuckers, et le son est plus mince que celui de ma Les Paul. Je lui ai aussi fait fabriquer une guitare par GMP pour son anniversaire, une Flying V Custom avec des rayures léopard et une finition sparkle.


Parles-nous des tes amplis Marshall Slash...
Ils sont recouverts de peau de serpent et estampillé "Slash Model", mais il y a aussi le logo de Snakepit. Le son est vraiment superbe. J'ai utilisé des Marshall Jubilee Silver Series pendant des années. Ce sont des 50 watt/100 watt avec un switch pour passer d'une puissance à l'autre. Mais il y a eu cette émeute à St Louis pendant un concert de Guns N' Roses et tout notre matériel a été détruit. Je ne savais plus quoi faire. C'est alors que Jim Marshall est venu me voir et m'a dit que je serai le premier endorseur Marshall. Il allait me construire des amplis suivant mes spécifications, sur la base des Jubilee Silver Series. Quand ils m'ont livré le premier, j'étais très nerveux, que faire s'il ne sonnait pas bien? Je n'avais aucun remplacement. Heureusement le son était exactement celui qu'il me fallait! Je suis très fier de ces amplis, et la production s'est immédiatement vendue. Maintenant j'ai des amplis stationnés partout dans le monde, en Europe, au Japon, à New York et à L.A. Quoi-qu'il arrive, ils sont là !


Tu as joué avec les Guns et maintenant avec Snakepit, mais tu as aussi fait ta part de travail en studio comme sideman avec Michael Jackson, Bob Dylan, Iggy Pop ou Lenny Kravitz. Comment traites-tu ce genre de gig ?
Il y a des gens que j'aime et admire, je donnerais mon bras gauche pour jouer avec eux ! C'est le producteur Don Was qui m'a fait jouer avec Iggy Pop, mais je connaissais déjà Iggy quand j'étais gamin. C'était un ami de David Bowie et ma mère sortait avec Bowie. Bob Dylan m'a également été présenté par Don Was. Il y a aussi des gens qui m'appellent et je me dis que ce serait cool de jouer avec eux. C'est ce qui c'est passé avec Chic, Nile Rodgers et le regretté Bernie Edwards, je jouais avec lui la nuit où il est mort au japon. Nous étions sur scène avec Stevie Winwood, Omar Hakim, Simon Le Bon et Sister Sledge. Un immense orchestre de stars, une expérience fantastique. Tout cela arrive assez souvent au hasard des rencontres, comme quand j'ai joué avec Bootsy Collins et James Brown pour son anniversaire, juste parce que j'avais rencontré Bootsy au Rainbow Bar !


Guns N' Roses a récemment sorti un double album live intitulé Live Era 87-93. Quel a été ton rôle dans la conception de cet album ?
J'ai établi une liste-type des chansons qui composaient notre set de l'époque et je leur ai laissé choisir les meilleures versions dans les enregistrements de quatre concerts, au Marquee de Londres, à Las Vegas, Minneapolis et au Tokyo Dôme. Je savais que la maison de disques essayait de combler le manque de nouvelles chansons dû à la séparation du groupe. Mais dès qu'il s'agit du groupe original, je dois être présent pour être sûr qu'il ne vont pas commettre une erreur. C'est ce qui s'est produit d'ailleurs, plusieurs photos du livret étaient inversées et il a fallu que je leur dise qu'il n'y avait pas de gaucher dans les Guns. Sur les premières copies, le disque 1 était en fait le disque 2, et vice-versa. Il y avait aussi une erreur de pressage, un loop dans "Paradise City" qui répétait à l'infini "Las Vegas". Une chance sur un million pour que ce genre de chose arrive et il faut que cela tombe sur nous! C'est devenu un collector, parce que j'ai fait rectifier ces erreurs sur le second pressage. Si tu as cette première version, garde-la !


Ton solo sans accompagnement "Theme From The Godfather" n'est pas inclus sur l'album live, bien que tu l'aies joué à presque chaque concert des Guns. Pourquoi ?
J'y ai repensé par la suite, mais j'ai préféré ne pas l'inclure par ce que c'était quel que chose de tout à fait impromptu, joué différemment chaque soir pour donner à Axl le temps de souffler. Le mettre sur l'album aurait signifié "Voilà c'est comme cela que je le jouais", alors que c'était à chaque fois différent. Et puis, je n'ai jamais vraiment été un grand partisan du "solo de guitare absolu". Eddie Van Halen en est un grand spécialiste, mais pas moi. Basiquement je ne pensais pas qu'il était important de l'inclure en prenant la place d'une autre chanson.


Que fait Izzy Stradlin actuellement ?
Il vient de sortir un nouvel album dont le titre est Ride On. Son groupe est composé de Duff McKagan, Rick Richards et Tax Bentley. La maison de disque a sans doute tablé sur la rumeur qui entourait la sortie du nouveau live des Guns, mais l'album n'est sorti qu'au Japon pour l'instant.


As-tu des nouvelles d'Axl Rose ?
II n'a pas changé. Sa compagnie de management, Big FD Entertainment, vient de porter plainte contre Duff McKagan et moi. Ils prétendent que nous aurions dû les payer pour le travail qu'ils ont accompli sur la sortie de l'album Live Era 87-93, alors qu'ils n'ont pas fait grand chose, ils se sont occupés de la publicité, parait-il. Mais leur campagne était pratiquement inexistante, en tous cas pour le laps de temps où nous avons engagé des managers personnels sans passer par eux.


Penses-tu rejouer un jour avec lui ?
(Rires) On me pose toujours cette question. A court terme, la réponse est non. A long terme, il faudraitune boule de cristal ! Je veux jouer du rock'n'roll, et Axl ne le veut pas actuellement, merci beaucoup! Nous n'avons rien en commun aujourd'hui, musicalement. Même si dans le passé les nouvelles directions du rock et du métal ont été introduites par des gens comme Van Halen ou Metallica, évidemment, mais aussi Gn'R.


Quand va commencer la tournée de Snakepit ?
Dès la sortie de Ain't Life Grand, la première semaine de mars. Nous allons jouer en Europe, au Japon, puis aux USA et en Amérique du Sud. Il m'a fallu un an pour monter le groupe, et c'est la première fois que je reste chez moi une année entière. D'ailleurs, même pendant cette dernière année, je suis allé jouer en Inde pour un concert avant de revenir à LA . J'ai aussi joué en Angleterre, Washington et New York, un seul show à chaque fois, juste pour me retrouver devant un public. Et bien sûr, tous les mardi soirs, je vais au Baked Potato pour jammer. C'est la meilleure manière de rencontrer d'autres musiciens, et c'est comme cela que j'ai trouvé les musiciens de Snakepit. On ne peut pas s'enfermer chez-soi et attendre en espérant que les gens viennent te voir !


Interview publiée en 2000 dans le magazine "Hard-Rock".