Qui : Slash | Quand : 2004 | Quoi : Scott Weiland, Guns N' Roses, la promo...


Bonjour, Olivier, Rock Hard France, c'est au sujet de l'interview de Velvet Revolver...
Salut moi c'est Slash. Tu es tout seul ? Il n'y a pas d'attaché de presse avec toi ? Ok, allons-y ! Je vais prendre une Guiness. Ah mince c'est vrai ! Ils n'en ont qu'en bouteille, elle est moins bonne.


Voudrais-tu que nous allions fumer une cigarette dehors pour commencer l'interview ?
Figure-toi que j'ai arrêté de fumer !!! Avec ma femme nous attendons un second gosse et nous avons tous deux pris la décision de lâcher la clope. Je fumais trois paquets par jour et un beau jour je me suis dit "lâche l'affaire Dude, ça ne sert à rien !!!" Je suis allé consulter un hypnothérapeute. En deux séances, j'ai arrêté de fumer. La première fut ultra classique : projection de poumons abîmés, statistiques sur l'horreur du tabac, bref le genre de truc que tu peux lire toutes les deux semaines dans les journaux. La deuxième fois, j'ai été hypnotisé et depuis sept mois, je ne fume plus. Ok ça paraît incroyable, je suis le premier à l'admettre, mais je te jure que ça marche. Va fumer ta clope et reviens discuter. J'ai payé 350 dollars pour ces deux séances. Aujourd'hui tous mes potes me demandent les coordonnés de ce thérapeute.


Cette interview est un peu impromptue. Je ne connais pas votre nouvel album, seulement le single paru sur la BO de The Hulk, "Set Me Free", car la maison de disque française n'a pas désiré, ou n'a pas pu, faire écouter le disque à de petits medias.
Je ne comprends rien aux maisons de disques. Nous faisons la promo de Contraband depuis quelques temps et personne ne connaît l'album. Pourtant BMG a des copies du CD depuis belle lurette. Il sortira le 11 mai.


Nous savons que l'album est prêt depuis longtemps. A quoi est dû ce retard dans la commercialisation ?
Disons que quand nous nous sommes lancés dans la préparation de ce premier album de Velvet Revolver, nous n'avions pas prévu, au sein du groupe, de l'achever aussi rapidement. Nous avons annoncé des dates aux gens de notre label et, bien évidement, quand ils ont vu que nous étions prêts plus tôt que prévu, ils se sont retrouvés paumés. Pour nous cela ne posait pas de problème. "Très bien, vous n'êtes pas prêt, nous allons prendre notre temps". Mais bizarrement, ils ont fait débouler cette horde de journalistes du monde entier le mois dernier et les pauvres ont dû rédiger des articles sur un groupe dont l'activité ne serait active que quatre mois plus tard. Je pense que nous avons commis une erreur au début : nous avons annoncé aux prospecteurs qu'il s'agissait d'un disque énorme pour nous. Mais par énorme ils n'ont pas saisi qu'il s'agissait d'une optique artistique. Ils ont immédiatement envisagé l'aspect marketing et ont été pris de court dès lors que nous avons été prêts. En même temps, il n'y a aucun ressentiment de notre part : nous apprécions que notre maison de disques ait envie de faire de Velvet Revolver quelque chose de très gros. C'est juste qu'en termes de planning les deux partis se sont plantés.


As-tu confiance en le potentiel du disque ?
L'as tu écouté ?


Non...
Ah oui, tu viens de me le dire, excuse-moi.... Confiant, je ne sais pas s'il s'agit du bon terme. Tu m'as dit que tu avais écouté "Set Me Free", mais le mix de la BO de The Hulk ne nous convenait pas. Nous avons eu la chance de le refaire et la version telle qu'elle nous plaît paraîtra sur Contraband. Le terme confiant est très ambigu : est-ce que Contraband va exploser les charts ? Est-ce qu'il va redéfinir les standards rock du 21ième siècle ? Est-ce que nous allons vendre 60 millions d'albums ? Allons-nous réinventer le paysage musical ? Pff… Je n'en sais foutrement rien et pour dire la vérité je m'en fiche. Je sais juste qu'il s'agit d'un putain de disque !


Pardonne moi mais ta réponse est vraiment téléphonée : il s'agit quand même d'un groupe réunissant quelques musiciens connus. Leurs noms sont Slash, Duff McKagan, Matt Sorum, Scott Weiland...
Je vois ce que tu veux dire mais je ne sais quoi répondre. C'est un putain de disque rock n' roll qui sonne killer avec des sonorités modernes qui n'occultent pas nos influences old school. Au niveau guitare, je me suis vraiment lâché, j'ai tenté des choses que je n'avais jamais eu l'occasion d'essayer auparavant. L'alchimie entre nous est énorme et... je ne sais quoi dire... Je suis heureux et fier de ce disque. Mais rien n'est comparable à l'anticipation que je nourris quant à jouer ces nouveaux morceaux devant un public.


Weiland est un chanteur à problèmes, personne ne l'ignore. Après l'expérience Axl qu'est-ce qui vous a motivé à recourir au service d'un garçon dans son genre ?
Quand tout ce bordel s'est enclenché, il s'agissait Duff et Matt et moi. Et sincèrement Scott est le premier chanteur auquel j'ai pensé. Duff était de mon avis, ce qui était plutôt amusant puisque nous ne le connaissions pas personnellement. Nous pensions juste qu'il avait une putain de voix. Nous avons monté le projet alors qu'il faisait toujours partie de Stone Temple Pilots. On s'est juste dit : "Fuck on lui envoie une cassette et on voit ce qu'il en pense…" Du fait de cette situation, nous savions que rien ne pourrait en sortir. C'est pourquoi nous avons auditionné différents chanteurs. Ca a duré huit mois et rien de concret ne s'est présenté. A ce moment, on nous a demandé de participer à The Hulk, alors que nous n'avions pas de vocaliste. Scott ne foutait plus rien avec Stone Temple Pilots. Aussi, nous lui avons demander de venir délirer en studio avec nous juste pour enregistrer ce titre. Et là ce fut magique : j'ai eu l'impression de jouer avec ce mec depuis des années. Nous lui avons filé une bande avec quelques riffs et il en a pris un ou deux, a écrit des paroles dessus, les a chanter et wouah ! Putain, c'était le truc ! Quelques jours après, pour consolider le projet, qui alors n'incluait pas Scott, nous avons donné un concert dans un club de Los Angeles, le El Rey et nous avons tout déchiré. Je ne connaissais pas ce mec, je ne l'avais jamais vu en concert. Mais quel tueur !!! Nous avons joué six titres et je n'ai jamais ressentis quelque chose d'aussi fort. Et je peux parié que c'était unanime, personne n'avais vu sonner un groupe aussi bien depuis des années.


Sebastian Bach était pourtant le favori pour le poste.
Nous avons auditionné un nombre incalculable de chanteurs et Sebastian était sûrement un des plus connus, des plus populaires. C'est un tueur. Il est venu aux répèts, il a donné la moitié de ce qui avait dans le bide mais il tuait, vraiment. En plus, je sais pas si tu le connais mais c'est un mec extravagant, complètement fou, blindé d'énergie, bref un tueur, un frontman, un vrai. Le problème c'est qu'au-delà de toutes ces qualités ça ne le faisait pas. C'est dur à expliquer mais Sebastian possède un tel charisme, une telle aura, qu'il bouffait l'identité du groupe. Nous avions plaisir à jouer avec lui, un sentiment réciproque, mais il y avait comme un déficit de notre coté, comme si son extravagante personnalité allait dévorer l'effort collectif que nous tachions de bâtir.


Bon touchons la base du problème : Axl Rose est ingérable, pourquoi porter votre dévolu sur Scott Weiland, tout aussi ingérable, dans un autre registre, certes, mais bon...
Ah bon Axl est ingérable ? Merci de me l'apprendre ! Axl est complètement taré ce n'est un secret pour personne. Mais était-il volontariste ? Non. Scott l'est. Il veut bosser, il se donne à fond. Ok, il a des problèmes, mais qui s'en soucie ? Nous sommes tous passés par là et avons surmonté ces problèmes ! Scott Weiland est un junkie ? Ok, et alors ? Nous avons besoin de lui, il a besoin de nous, nous nous faisons plaisir en collaborant ainsi. Nous sommes derrière lui pour qu'il s'en sorte et sincèrement je pense que nous sommes les meilleurs conseillers qu'il puisse trouver. Crois-tu que nous le pointons du doigt en lui reprochant telle ou telle attitude ? Pff... Duff, Matt et moi pouvons-nous nous permettre de mettre en accusation un garçon qui a des problèmes de drogue ? Soyons sérieux ! Nous essayons de l'aider du mieux que nous pouvons. Nous ne sommes pas médecins mais d'anciens patients.


Pourquoi avoir décidé de vous réunir, Duff, Matt et toi après toutes ces années ?
Nous n'avons rien décidé du tout ! Tu te souviens de la mort de Randy Castillo ? C'était un putain de bon pote à nous et il y a eu un concert ici à L.A., au Key Club, en sa mémoire, et dans le but de réunir des fonds pour sa famille avant qu'il ne décède, afin de prendre en charge les soins inhérents à son cancer. Tout le monde était prêt pour l'événement et Matt m'a appelé me demandant si ça me branchait de jouer avec lui. Mais nous étions comme deux cons, alors on s'est dit qu'il fallait appeler Duff. Ok, il glandait à Seattle mais ce n'était pas le genre d'événement auquel il pouvait rester insensible. Ensuite, nous avons appelé le chanteur de ce groupe dont je ne me souviens plus le nom... Buckcherry. On a répété, on joué, Steven Tyler s'est pointé et on a donné un putain de set. Ensuite, Duff, Matt et moi sommes allés boire un verre et, après six ou sept ans, on s'est dit que tous les trois, on le faisait encore. Nous avons donc pris la décision de bosser ensemble mais au bout de trois mois, ça ne le faisait pas avec le chanteur de Buckcherry. Rien de personnel vraiment. Ca ne le faisait pas, c'est tout. Mais tous les trois, nous étions à fond, nous sentions l'urgence de bosser ensemble.


Peut-on parler de Guns N' Roses ?
Pourquoi poses-tu cette question ?


Euh... nous avons la chance d'être en tête-à-tête. Souvent les attachés de presse dictent leurs consignes. J'imagine que, dans ton cas, cette personne, qui est heureusement absente, m'aurait indiqué d'éviter le sujet.
J'en ai rien à foutre de Guns N' Roses ! Tu peux me poser toutes les questions à ce sujet, mais je ne suis pas sur de pouvoir satisfaire ta curiosité. Pour moi, Gn'R c'est du passé. J'ai fait partie d'un grand groupe de rock n' roll qui est mort aujourd'hui. Il est normal qu'on me questionne dessus. Bon, je comprends l'intérêt de la presse : fuckin' Duff, fuckin' Matt et fuckin' Slash font partie de Velvet Revolver… Mais il n'y a vraiment pas grand chose de commun entre les deux groupes. Dave Kushner joue de la guitare avec nous, Scott chante et ce dernier a vraiment apporté un truc qui nous différencie totalement de Gn'R.


Tu t'imagines pourtant qu'avec Velvet Revolver tous le monde s'attend a retrouver le vrai Guns N' Roses.
Désolé mais nous allons décevoir tous ces gens. Il n'y a rien dans ce que nous faisons qui soit proche de Gn'R. Ce qui est clair, c'est qu'il n'y a aucune volonté de Duff ou de moi de ressusciter Guns. Nous en avons parlé d'entrée : nous n'avions pas joué ensemble depuis si longtemps que Gn'R était déjà bien loin derrière nous. Nous savions que de toute façon, ça n'allait pas manquer : "VR est le nouveaux Guns N' Roses". Nous avons voulu nous éloigner de ce piège autant que possible. Je sais pas, imagine tu bosses avec un pote que tu perds de vue. Quand tu le retrouves, as tu envie de ressasser le passé ? Non, tu peux te servir de ce passé, mais en aucun cas t'appuyer dessus pour fonder un projet musical. Velvet Revolver n'a absolument rien a voir avec Guns N' Roses. Axl n'a pas lâché l'affaire, il continue dans le trip Gn'R. Pas nous.


Tu es quand même conscient que Gn'R est une marque de fabrique. Le groupe de rock des années 90.
Effectivement, je crois que c'est vrai ! Mais honnêtement, à l'époque, crois-tu que dans notre local de répétitions pourri nous pensions à une telle chose ? Pensions-nous que nous allions engendrer ce monstre ? Jamais, pas un seul instant... Et Axl non plus, je peux te l'assurer ! Quand Gn'R a débuté, j'étais le plus jeune, le plus timide, le plus calme, le mec dans son coin, sans réelles ambitions. Crois-tu que j'ai imaginé une seule seconde ce que ce groupe deviendrait ? Mais aujourd'hui je suis heureux car je ne suis pas sûr que les gens portent la même affection que la tienne à Gn'R mais je suis reconnu en temps que guitariste. Je suis un mauvais guitariste, c'est ce que je pense. Mais d'autres s'imaginent le contraire. C'est une grande fumisterie dont je suis heureux.


Il y a quelques années j'ai discuté avec les membres de Insane Clown Posse. Je leur ai demandé comment ils avaient réussis à avoir un riff et quelques solos de Slash sur leur premier album. Ils m'ont répondu qu'ils t'avaient payé avec une caisse de Jack Daniel's !
J'aime bien jouer de la guitare, je n'y peux rien. On m'invite et si mon emploi du temps me le permet, je fonce. C'est un peu moins le cas aujourd'hui car je suis de plus en plus occupé. Je ne suis plus le "session player" que j'ai pu être. Je n'ai plus le temps. Surtout ces derniers temps : je suis trop à fond dans Velvet Revolver.


N'y allons pas par quatre chemins : le Snakepit a été un gouffre. Comment l'as-tu ressenti ?
Tu es dur. Le premier album a bien marché. Et ça m'a beaucoup plu car il fallait m'extraire de la machine Guns N' Roses. Je faisais toujours partie de Gn'R mais il me fallait respirer. En revanche, je suis d'accord, l'échec du deuxième Snakepit alors que je n'étais plus dans Guns N' Roses a été très dur à vivre. J'étais assailli par tous ces gens qui voyaient ce disque comme un supplétif à Gn'R, une façon pour moi de capitaliser sur la dissolution du groupe. Je me suis retrouvé avec un milliard de prétendus managers à mes basques tachant de m'expliquer ce qu'il fallait faire. Merde ce n'était qu'un putain de disque de rock n' roll et tout le monde l'envisageait comme la huitième merveille du monde ! Je n'étais vraiment pas prêt pour cette agression de cafards du business ! Mais cette expérience m'a fait du bien : Geffen, ma maison de disque, était en train de se faire racheter par Interscope en s'appuyant sur Gn'R, dont je ne faisais plus partie, le business voulait s'accaparer le monstre Slash, alors que dans ma tête je suis toujours resté le même petit guitariste qu'il y a quinze ans. Le deuxième album du Snakepit est un album que j'apprécie, c'est une expérience enrichissante en terme de business. Je n'éprouve aucun regret si ce n'est d'avoir vu tourné tous ces requins rôder autour de moi. Aujourd'hui je suis bien meilleur au niveau business.


Des dates européennes de Velvet Revolver ont récemment été annoncées. Qu'en est-il réellement ?
C'est un peu le bordel, je l'avoue. Les problèmes judiciaires de Scott sont difficiles à gérer et des dates ont été publiées sur Internet alors qu'il ne s'agissait que de plans sur la comète. Ce qui est sûr c'est que nous allons patienter jusqu'à ce que Scott se sorte de ses merdes, ce qu'il ne manquera pas de faire, pour nous engager sur une vraie tournée. Scott est en ce moment en train de tout faire pour s'en sortir, il y parvient. Mais il est victime d'un acharnement judiciaire typiquement américain qui nous empêche de progresser. Il est en cure de désintoxication, il est clean et devait sortir le mois dernier, mais, pour je ne sais quelle raison, sa peine a été prolongée. Nous attendons sa prochaine apparition au tribunal. Tout le monde l'attend au tournant car cette affaire a pris des proportions énormes.


Interview publiée en 2004 dans le magazine "Rock Hard".